Journées IARD : derniers réglages de Solvabilité II
Les 23 et 24 mars derniers, quelques mois avant la mise en application de la directive, les journées d’études IARD ont permis de faire le point sur l’avancée des travaux actuariels. À côté des retours d’expérience et exposés techniques, l’intervention du président de Covéa, Thierry Derez, a marqué la manifestation.
« Le secteur de l’assurance va rentrer dans une nouvelle ère »
L’actuariel : La directive Solvabilité II doit entrer en application le 1er janvier 2016. Selon vous, tous les acteurs sont-ils prêts ?
Thierry Derez : Globalement. Mais il aura fallu seize ans pour
en arriver là, avec beaucoup de mesures transitoires. Une clause de revoyure est prévue dès 2018. Mais celle-ci se fera peut-être plus tôt si l’environnement économique (notamment les taux bas) perdure. Néanmoins, malgré les doutes, Solvabilité II va faire rentrer le secteur de l’assurance dans une nouvelle ère.
L’actuariel : Peut-on parler de bouleversement des métiers ?
T.D. : Le noyau de l’assurance est paradoxal, car il repose
sur les mathématiques et le droit. C’est un alliage improbable
mais ces deux disciplines parviennent à vivre ensemble. Solvabilité II modifie un peu les lignes mais le droit et l’assurance restent au cœur : c’est aussi pourquoi l’actuariat a de beaux jours devant lui.
L’actuariel : Et qu’attendez-vous des actuaires ?
T.D. : Nous attendons beaucoup de ces professionnels. Mais
ils doivent essayer d’améliorer leur communication dès qu’ils sont en contact avec le reste de l’entreprise. Il leur faut être intelligibles
et avoir la capacité d’échanger avec les autres. L’actuariat
a vu son champ d’intervention s’étendre avec Solvabilité I et cela va s’accentuer avec Solvabilité II : la responsabilité des actuaires
est de ne pas s’isoler du reste de l’entreprise.
L’actuariel : Pour Covéa, quelles sont les conséquences ?
T.D. : Sur le plan national, il n’y a pas de gros changements
en IARD. Comme il y a peu de croissance en France sur ce segment, Solvabilité II aura un impact neutre. En revanche, cela va avoir
des effets secondaires sur le plan international. Car nous sommes en compétition avec des assureurs de pays non européens
qui ne sont pas soumis à Solvabilité II. Or, cette directive va laisser aux assureurs européens une frange de capital bien inférieure
à celle laissée par les autorités japonaises ou américaines à leurs assureurs. Concernant Covéa, Solvabilité II nous a aidé à structurer le groupe et nous a évité des redondances dans certaines activités. Cela a été un vecteur d’accélération dans la constitution du groupe.
L’actuariel : Vous insistez aussi pour ne pas mettre sur
le même plan compagnie d’assurances et groupe mutualiste…
T.D. : Tout à fait. En cas de difficulté, nous ne pouvons pas faire appel au marché : il faut donc maintenir un niveau de solvabilité plus élevé car, en cas de coup dur, nous ne pourrons pas
avoir rapidement accès à des capitaux frais. Il n’est pas possible d’avoir la même gestion des capitaux propres, nos résultats n’étant pas distribués à des actionnaires.