Panorama mondial des méthodes de provisionnement
Précieux outil de benchmark, le Panorama mondial des provisionnements en assurance non-vie vient d’être publié par l’ASTIN. Implication des actuaires, méthodes utilisées, Big Data… L’actuariel révèle les principaux enseignements de cette vaste cartographie ainsi que certaines analyses en exclusivité.
Questions à:
Frank CUYPERS, responsable des groupes de travail ASTIN « Working Parties », actuaire ASA et DAV
et Pierre MIEHÉ, chef de projet du WPNLReserving, actuaire certifié IA, Cera
Tous deux membres du comité ASTIN
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L'actuariel : Quelle a été la motivation initiale pour l’ASTIN ?
Pierre Miehé : Nous avons souhaité recenser les pratiques actuarielles internationales afin de permettre aux assureurs de se « benchmarker », avec également l’ambition de favoriser les liens entre praticiens et chercheurs. Cela démontre que l’ASTIN n’est pas qu’une association orientée recherche « théorique », mais qu’elle s’attache à répondre aux besoins pratiques des assureurs. Ce projet, intitulé WPNLReserving, est d’ailleurs né des « Working Parties » mis en place par Frank depuis quelques années.
L'actuariel : Qu’est-ce qu’un « Working Party » ?
Frank Cuypers : Un « Working Party » est un groupe de travail sur un thème technique et/ou pratique. Son objectif est d’établir un rapport qui est partagé avec l’ensemble des membres de l’ASTIN. Nous avons lancé les « Working Parties » en 2013, avec l’objectif de valoriser le formidable réseau mondial de l’ASTIN.
L'actuariel : Comment lance-t-on un « Working Party » ?
F. C. : Tout membre de l’ASTIN peut en proposer un. Il écrit simplement un court document (pas plus de 2 pages) précisant son objet, son contenu et son mode opératoire, et il le soumet au comité ASTIN. Si le comité décide de le lancer, il aide l’initiant à recruter d’autres participants parmi les membres via un appel à candidatures. Une fois lancé, l’ASTIN apporte son soutien logistique et financier au « Working Party ».
L'actuariel : Avez-vous été surpris par l’engouement pour le WPNLReserving ?
F. C. : Complètement ! Ce qui prouve que le projet répond à une attente réelle. Nous avons reçu de nombreuses candidatures provenant de plus de 40 pays. La sélection a été ardue.
P. M. : Coordonner des personnes dans plus de 40 pays, dans tous les fuseaux horaires et avec des cultures si différentes, a requis une attention particulière pour la gestion de projet et le suivi des délais. Mais j’ai, la plupart du temps, été particulièrement surpris par les taux de réponses souvent très élevés et l’enthousiasme des participants. À titre d’illustration, la responsable australienne a proposé d’ajouter au rapport une section spéciale sur le futur du provisionnement et a constitué un sous-groupe de travail qui a délivré, en moins d’un mois, un rapport que je trouve d’excellente qualité.
L'actuariel : Concernant les résultats de l’étude, quelles ont été vos principales surprises ?
F. C. : L’homogénéité des méthodes les plus utilisées ! Nous nous attendions à une victoire de Chain Ladder, mais que la méthode soit plébiscitée à ce point, certainement pas…
P. M. : Le niveau d’utilisation de la méthode de Bornhuetter-Ferguson est également très élevé. Pour les méthodes plus « exotiques », il est intéressant de noter leur propagation géographique. Ainsi, la méthode de Munich Chain Ladder, établie en Allemagne, est principalement utilisée par les pays voisins et, plus étonnamment, en Asie (Hong Kong, Taïwan…), au Liban, au Pérou…
F. C. : Nous avons été déçus par la faible percée des méthodes sur les sinistres individuels. La section sur le futur du provisionnement mentionne d’ailleurs clairement le risque que les actuaires ratent le virage du Big Data. Seules la Suisse et la Suède utilisent ces méthodes à plus de 20 %.
L'actuariel : Et maintenant ?
F. C. : J’espère que l’étude permettra à l’ensemble des assureurs de se benchmarker et de mieux comprendre les spécificités de chacun des pays. Et que cela encouragera les actuaires à essayer de nouvelles méthodes et à renforcer leurs process de reserving.
P. M. : Même si nous n’envisageons pas d’actualisation annuelle, compte tenu du principe de stabilité des méthodes appliqué dans les compagnies, nous réfléchissons à relancer l’étude entre 2018 et 2020, en fonction de l’intérêt exprimé et de l’évolution de l’implantation du Big Data.
Pour en savoir plus : le dossier complet est téléchargeable sur le site actuaries.org