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21 décembre 2017

Santé : le droit à l’oubli, quand et pour qui ?

Encadré

Jusqu’à quand est-on considéré comme « à risque » par son assureur ? La réglementation évolue, permettant d’éviter la déclaration, passé un certain délai post-traitement.

Chaque année, en France, 15 % des demandes d’assurance de prêt présentent un « risque de santé aggravé ». La sanction est alors immédiate : surprimes ou exclusions de garantie.

Renégocier son contrat d’assurance

Pour faciliter l’accès au crédit des personnes malades, pouvoirs publics et professionnels de l’assurance ont conclu en 2006 une convention baptisée Aeras (s’assurer et emprunter avec un risque aggravé de santé). Depuis, cette convention s’est régulièrement enrichie de nouvelles dispositions, dont un avenant, signé le 2 septembre 2015, qui introduit le « droit à l’oubli ». « Le droit à l’oubli est intimement lié au droit de renégocier son contrat d’assurance annuellement. On va ainsi considérer que, passé certains délais, les personnes ayant suivi un traitement médical à un moment de leur vie peuvent, en toute légalité, ne plus le mentionner quand il est scientifiquement avéré que l’antécédent médical n’a plus d’incidence sur l’appréciation du risque. Cela leur donne la certitude d’obtenir un meilleur tarif », explique Sylvain Coriat, actuaire certifié IA, directeur des assurances de personnes d’Allianz.

Qui peut bénéficier de ce droit à l’oubli ? La loi du 26 janvier 2016 de modernisation du système de santé a établi une grille de référence qui fixe les délais, maladie par maladie, au terme desquels les anciens malades peuvent souscrire un contrat d’assurance sans surprime ni exclusion de garantie. À ce jour, tous les anciens malades du cancer dont le traitement a cessé depuis plus de dix ans n’ont plus à déclarer à leur assureur qu’ils ont été malades. Pour eux et eux seuls, le droit à l’oubli s’applique pleinement.

Une portée encore très limitée

Pour les anciens malades d’un cancer du col de l’utérus, de certains cancers du sein, d’un mélanome de la peau et de l’hépatite C, le délai tombe à un an après la fin du traitement et sans rechute. Pour les anciens malades d’un cancer de la thyroïde ou d’un testicule, le délai est compris entre trois et dix ans après la fin du traitement et sans rechute. Mais, dans tous ces cas, le questionnaire de santé demeure un passage obligé. « Entre la complexité des procédures et les revers subis, beaucoup renoncent à faire connaître leur état de santé, quitte à effectuer de fausses déclarations. Outre le fait qu’ils se mettent dans l’illégalité, ils prennent un risque considérable, celui de se priver de toute couverture en cas de difficulté », souligne Frédéric Lert, président du collectif [im]Patients, chroniques & associés, qui fédère treize associations de personnes atteintes par une maladie chronique.

La grille de référence a vocation à être actualisée au rythme des progrès thérapeutiques et de la disponibilité des données de santé nécessaires. Ainsi, les conditions appliquées aux personnes séropositives devraient bientôt être revues. Jusqu’à présent, lorsqu’une personne séropositive souhaitait contracter un crédit immobilier, elle s’exposait à des surprimes pouvant atteindre 300 %. Celles-ci devraient être plafonnées à 100 % à la faveur de certains critères. Là encore, pas de vrai droit à l’oubli. « Les efforts menés sont louables, affirme Stéphane Loisel, professeur des universités, laboratoire de Sciences actuarielle et financière (Isfa) de l’université Lyon 1. Mais beaucoup de personnes restent non éligibles aux critères nouvellement institués. Et l’enjeu demeure entier : celui d’une société à la fois inclusive et qui maintienne un système de protection soutenable. »

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