Interview S. Chappellier et P-A. Merle, Actuaris
« Les tarifs devront être le plus justes possible »
Stéphane Chappellier, actuaire IA, responsable du pôle IARD d'Actuaris, et Pierre-Antoine Merle, actuaire IA, consultant IARD d'Actuaris
l'actuariel : La loi Hamon va-t-elle, selon vous, entraîner une hausse des coûts pour les assureurs ?
Stéphane Chappellier : Si le taux de résiliation des contrats s’envole, il y aura beaucoup de clients à conquérir pour les assureurs. Leur coût d’acquisition augmentera. Parallèlement, le temps de détention des contrats raccourcira. Avec un taux de résiliation moyen de 16 %, les assurances auto restent aujourd’hui six ans en moyenne en portefeuille. Si le taux passe à 25 %, la détention tombe à quatre ans. Il faudra amortir sur une durée plus courte des coûts d’acquisition plus élevés.
l'actuariel : Les assureurs pourront-ils augmenter leurs tarifs dans un marché plus concurrentiel ?
S.C. : Les tarifs vont surtout être de plus en plus segmentés afin de refléter au plus près le risque. Les cases tarifaires vont devenir de plus en plus petites pour que le tarif soit le plus juste possible. Les assureurs qui ne le feront pas se retrouveront antisélectionnés avec les profils de risque les plus élevés acquis à un prix inférieur à leurs coûts. Néanmoins, des considérations de positionnement par rapport à la concurrence et d'élasticité au prix de la demande pourraient avoir des effets contrastés.
l'actuariel : Concrètement, comment les assureurs vont-ils s’y prendre pour accentuer la segmentation tarifaire ?
Pierre-Antoine Merle : En utilisant, par exemple, de nouvelles variables tarifaires qui proviennent du croisement de plusieurs données. Ainsi, en croisant le mode de détention du logement et l’âge, on obtient de nouvelles catégories, « jeunes propriétaires » et « seniors locataires », avec un profil de risque différent des « jeunes » et « seniors » pris globalement. Ensuite, les assureurs peuvent recourir à davantage de données extérieures, comme le fichier SIV, qui permet de mieux connaître le véhicule et son équipement. Ces informations aident à mieux cerner le risque. On sait, par exemple, que les systèmes anticollision diminuent la sinistralité d’environ 30 %. Enfin, les règles de souscription pourront être plus fines pour filtrer au mieux les clients.
Propos recueillis par Virginie Sagot